pied noir

Né à Bab El Oued - 1948 - ALGER

 

Liste des messages

De : Antoine/Tony BILLOTTAEnvoyer un mail

Le : 25/07/2024 08:42

Hubert Zakine.
QUELQUES EXPRESSIONS PATAOUETES (Ah ouais, "j'm'en rappelle...)

• Quand y s’en va, on dirait qu’y revient : celui qui marche à la six- quatre-deux.
• Mais de qui y tire celui-là : la mère qui se posait cette question chaque fois que son fils y faisait une bêtise, elle connaissait la réponse, va : DE SON MARI !
• Va te faire un amant : attention, on envoyait toujours l’interlocuteur mais jamais l’interlocutrice se faire voir par quelqu’un d’autre ! Faut pas exagérer, on savait vivre à Bab El Oued !
• Je te connais comme si j’t’avais fait : tellement que le soleil y nous avait fait semblables, qu ‘on se ressemblait. La palice elle aurait pas dit mieux ! Alors on savait ce que pensait l’autre.
- Cinq dans tes yeux : la main bien ouverte face au mauvais ½il.
• Bourricot de la montagne : le même que le bourricot espagnol sauf qu’y parlait pas ibérique alors forcément il était moins intelligent. En fait, y se tenait une couche, j’vous dis pas !
• Que dieu y nous en préserve : une autre manière de se préserver du mauvais ½il.
• Va te faire une soupe de fèves : la vérité, tout le monde y préférait la loubia s’il était pas content.
• Tu t’es fait la raie comme le tournant Rovigo : Pour ceusses qui connaissent pas (y doit en avoir deux) le tournant Rovigo, que des virages il avait. Et obligé ou sinon y s’appellerait autrement. Tout y faut vous dire alors ?
• Attaches toi et fais du vent : cuilà, le pauvre y croyait qu’il était le sosie de Tyrone POWER et Robert TAYLOR à lui tout seul que total, sans être mauvaise langue, Quasimodo à côté, c’est un Adonis.
• Fermes les fenêtres, y va s’envoler : cuilà, c’est le frère du précédent.
• Avoir les côtes en long : le fainéant, rien que sa mère elle lui reprochait cette anomalie physique. Comme si c’était sa faute ! tssssi !
• Il a la tête comme un tchic-tchic à trois faces : il est vilain qu’il en peut plus.
• Tu es un plein de vent : çuilà rien qu’y raconte des tchalefs.
• Taper la sérénade à Magali : quand le « patos » y dit « Germaine, le petit pleure ! », le pataouète y rouspète "« Finette ! Cà fait une heure que ton fils y nous tape la sérénade à Magali ! »
• Attaquer ses parents en dommages et intérêts : la vérité, faire des enfants aussi vilains que les frères k......, ( je dis pas le nom, j’ai pitié quand même) çà mérite pas de passer au tribunal ?
• Une figue à l’½il, je le dobze : tellement ch’uis plus fort, ya pas photo. Les yeux bandés, je gagne. Quel fanfaron ch’uis !
• J’te donne une, le mur y t’en donne une autre : deux contre un on est. Le mur il est avec moi.
• Y lui reste que les yeux pour pleurer : nu et cru, le pauvre y reste.
• Elle l’emportera pas au paradis, va : toute sa vie elle a été mauvaise ; mais cette fois, çà va pas lui porter chance, c’est moi qui t’le dis !
• Descendre le lit à la rue : la rue c’est la deuxième maison. Les mères, rien qu’elles se lamentaient pace que les petits y restaient en bas la rue au lieu de monter souper.
• Faire Pâques avant les Rameaux : les garçons pataouètes (et quelques filles) rien qu’y voulaient inverser les dates du calendrier. Asaoir si le Vatican il était d’accord ? Jamais avant le mariage, espèce de gros sans-gêne !
• Le ménage y se fait pas tout seul : alors mieux vous traînez pas dans mes jambes. Comme çà, elles nous parlaient nos mères, vous vous rendez compte !
• Les yeux de merlan frit : une autre version des yeux « balala » de ceux qui restaient babao devant une nouvelle qu’elle les laissait pantois.
• Comment tch’étais, comment tch’es devenu : la vérité ! est-ce utile de vous fournir la traduction. Comme je suis révérencieux avec les femmes, je m’adresse rien qu’aux hommes. « regardez vous dans une glace ». Bou, je vais me faire lyncher. Oh, moi aussi, j’étais le plus beau du monde et des alentours ! aujourd’hui, ch’uis seulement le plus beau du monde. Je plaisante ! ! ! ! !
• Çà sent le renfermé : Les femmes pataouètes elles aiment pas la poussière alors elle aère un maximum ; le courant d’air c’est leur ami le plus proche pace qu’elles aiment pas le renfermé. A Barberousse, qué çà doit sentir ? Man yafourah !
• J’ai pas la bourse de ROTSCHILD : qui c’est qui l’a à part Rotschild ?
- A la six-quatre-deux : à la babala, à la va comme j’te pousse.
• Changer l’eau des olives : moi, c’était au pissoire du jardin Guillemin que je changeais l’eau des zitounes. Et vous z’autres ?
• Ce garçon, c’est une canule à lavement : franchement, l’impact d’une canule à lavement il est pas plus fort qu’un enquiquineur ? La vérité. En plus, l’image elle est plus forte. Pour résumé, une canule à lavement c’est un enquiquineur puissance mille !
• Taper une olive : taper une olive au sens propre (encore que..) c’est toucher les fesses d’une femme ( les tapettes, très peu pour moi, merci ). Au sens figuré, c’est taper un coup de téméniek à quelqu’un, une feinte.
• Oh ! Ton père il est vitrier ? toujours tu restes devant moi, alors plus rien je vois !
• Je peux pas le voir en peinture : même avec un beau cadre et tout et tout, il est quand même vilain ! je l’aime pas !
• Y me sort par les yeux : y’en a qui sortent par la porte, d’autres de la cuisse de Jupiter, alors obligé, on en a marre de les voir et de les entendre.
• Une moins que rien : une fille perdue. Pas pour tout le monde, va. Y’en a j’vous jure !
• Partisan du moindre effort : le pataouète, il est pas fainéant, il est partisan du moindre effort ! Nuance !
• Boire du petit lait : cuilà qu’il était heureux, cha! cha ! ou alors qu’il avait fait une couillonnade en bâton et qu’y voulait se faire pardonner. Un babao, quoi !
• Garder ses forces pour tirer la chasse : recommandé à tous les « partisans du moindre effort ».
• Demain le bon dieu il est grand : la version pataouète de « à chaque jour suffit sa peine » sauf que nous z’autres on avait des escuses à cause de la chaleur qu’elle nous obligeait à « taper la sieste », et alors !
• Son manteau, c’est un cache-misère : un beau pardessus vaut mieux qu’un beau par dessous, ma parole !
• Antiquité, ma grand mère, elle s’habille cette fille : l’officiel des antiquaires , même plus y côte la robe et la fille, alors !
• L’école et toi, vous êtes pas passés par la même porte : je connais pas un élève qu’il a pas reçu cette constatation marquée de bon sens dans les gencives.
• Ce petit, il est en nage : les enfants pataouètes y transpiraient pas. Y z’étaient en nage. Même si savaient pas nager.
• Ce petit (c’est le même) y va me tomber dans un lit : après avoir été en nage, il attrape une congestion et y tombe dans un lit.
• Y faut avoir tué son père et sa mère : ma mère la pauvre c’est çà qu’elle a dit quand elle a su qu’on allait habiter la banlieue parisienne. Avec le train et tout ! Bou arlékoum, nous z’autres !
• Quel cassement de tête: la femme pataouète c’est la reine du mauvais sang, du cassement de tête, quoi !
• Ton mari, tu devrais l’envoyer chez ROUBI : cuilà que sa tête elle jouait aux tchic-tchic, on l’envoyait chez Roubi, l’asile d’aliénés de chez nous.
• N’en toucher pas une : quand c’était le cas, au lieu de récolter des applaudissements, le chanteur ou le footballeur, y recevait des tomates.
• Se noyer dans un verre d’eau : rien à voir avec GOTVALLES ! Ce babao, tout, c’est pire que chercher une aiguille dans une botte de foin ! Il est pas dégourdi pour un sou. Ou alors, c’est un fainéant.
• Ces cheveux, y te mangent la figure : le contraire de fartasse. quand les cheveux tellement y sont longs que ça lui donne une mine de papier mâché.
• Y vaut pas trois sous espagnols, cuilà : une misère çà coûte !
• Donne lui sa mère , j’connais son père: encouragement claironné lors d’une bagarre tête contre tête dans une entrée de maison. Et même dans une sortie !
• Y connaît ni son père ni sa mère :ya des moments dans la vie où la colère elle est mauvaise conseillère. Tête baissée on fonce. Plus personne on connaît. Rien qu’on cogne.
• Çà m’en touche une sans faire bouger l’autre : cuilà qui réussit, y passe illico presto à « incroyable mais vrai » ! ou alors il en a qu’une !
• Faire la chaîne au cinéma : le pataouète il est poli, bien élevé et tout et tout. Alors y tape la chaîne pace que si y tapait la queue ça voudrait dire autre chose, alors !
• Taper cao : faire l’école buissonnière à la mode de chez nous.
• Faire Manca oura : kif kif bourricot
• Se faire morfler l’½il : se faire dobzer dans une entrée de maison ou ailleurs. Seul le résultat y compte.
• Avoir un appétit d’oiseau : c’était le début du mauvais sang pour une mère de chez nous pace que son fils c’était pas un morfal. « y faut manger ! chitane »
• Cette petite, c’est un poivron piquant : cette fille, elle est mauvaise comme la galle.
• Un coup de sminfin coufin : un coup de téméniek, un coup de zouzguèfe, vous êtes pas plus avancés ? un coup de Trafalgar, une feinte, oh vous avez compris ouais ! Comme la grande Zohra. Tiassardo !
• Coup de t’méniek : kif kif bourricot ( d’Espagne )
- Coup de zouzguefe : kif kif bourricot ( de la montagne )
• Pas un y rachète l’autre : quand tous les moutons du troupeau y valent pas cent sous.
• Fagoté comme l’as de pique : cuilà qui s’habille à Bab Ej Did plutôt que chez DIOR ! Le gavatcho dans toute sa splendeur.
• Avoir un trou qui fait de l’air : adressé à celui qu’il est toujours jamais content
• Marque dommage.
• Que le Bon Dieu y me crève les oreilles pace que si y me crève les yeux, plus rien je vois !
ETC......................................................................

 

De : Daniel AZAMEnvoyer un mail

Le : 22/07/2024 15:17

Un grand grand merci à Antoine Billotta qui met beaucoup de coeur et d'énergie à faire survivre notre site préféré. Depuis de nombreuses années nous avons été fort nombreux à lire les milliers de messages des natifs de notre cher quartier. Au fil des ans malheureusement beaucoup de copains, d'amis nous ont quitté.
Ce sera toujours un bonheur de lire de nouveaux textes ou messages.

 

De : DOMENECH LilianeEnvoyer un mail

Le : 21/07/2024 15:38

Correction :
plus belles années.

 

De : DOMENECH LilianeEnvoyer un mail

Le : 21/07/2024 15:37

Ca fait du bien de lire toutes ces anecdotes et tous ces récits.
Continuez les amis. çà nous ramène à nos jeunes et plus années.
Les mariages dans le même quartier, je connais, Mes parents habitaient aussi sur le même palier.

 

De : Antoine/Tony BILLOTTAEnvoyer un mail

Le : 21/07/2024 11:59


Pour partager ces récits avec celles et ceux qui les apprécient. Merci pour vos commentaires reçus en privé.


Serge Timsit

La rue Marengo 15 et fin

Lorsqu'il y avait une personne décédée (chrétienne ou juive), l'entrée de son immeuble était encadrée de lourds draps noirs avec des liserés argentés et sur la partie supérieure du drap, en son milieu, étaient affichées, également en lettres argentées, les initiales du défunt ou de la défunte.
Dans le hall d'entrée de l'immeuble, sur une petite table, était installé le cahier de condoléances sur lequel personne n'oubliait de venir inscrire des mots de réconfort et d'y apposer son paraphe.
Puis arrivait le corbillard. C'était une espèce de calèche noire, couverte, ornée à ses quatre coins, de plumeaux couleur ébène, vitrée, tirée par deux, voire quatre chevaux chapeautés, eux aussi, de plumeaux noirs. Le cercueil était installé à l'intérieur de la "calèche", il restait visible par tous, et toute la famille, tous les amis, tous les voisins s'ébranlaient en une longue procession, à pieds, jusqu'au cimetière de Saint Eugène dans la banlieue d’Alger.
Même si cette procession gênait la circulation, les automobilistes et autres conducteurs de véhicules divers ne manifestaient aucun signe d’impatience et respectaient la lenteur de la procession.
Le corbillard présenté ici ressemble aux nôtres qui étaient plus sobres. Ils étaient entièrement noirs et n’avaient pas toutes ces décorations étoilées, Je ne sais plus si les chevaux étaient recouverts d’un drap ou s'ils restaient nus
Pour son dernier voyage, le défunt avait vraiment fière allure !
Lorsqu'il y avait le décès d'un musulman, la cérémonie était un peu différente. Il n'y avait aucun signe visible devant l'immeuble. Le défunt, enveloppé dans un drap, était installé dans un cercueil sans couvercle simplement recouvert d’un drap plus ou moins décoré, souvent de couleur verte. Il comportait des manches devant et derrière pour qu’il fût porté sur les épaules des hommes qui l'accompagnaient à sa dernière demeure, et tout ceux qui voulaient lui témoigner un dernier hommage prenaient un relais sur quelques mètres ou dizaines de mètres. La foule, masculine, de la famille, des amis et des voisins suivait derrière, jusqu'au cimetière d’El Kettar.
Dans tous les cas, les piétons gardaient le silence, et souvent les hommes se découvraient au passage de la procession.
Pour éviter un début de décomposition des corps, les obsèques avaient toujours lieu le lendemain et au plus tard le surlendemain des décès, alors qu’aujourd’hui les corps sont conservés plusieurs jours dans les chambres froides des hôpitaux. Il n’y a donc plus de signe devant l’entrée de l’immeuble de la personne décédée. De plus, compte tenu des distances souvent importantes à parcourir et des problèmes de circulation, il n’y a plus de procession, le corps est amené pour un enterrement ou une crémation, dans une voiture assez banalisée et un simple lieu de rendez-vous est donné à tous ceux qui souhaitent participer aux obsèques (pour les chrétiens, ce rendez-vous est souvent l’église).
*
- Un soir, dans une période où les attentats et les meurtres étaient quotidiens, vers 19 heures, je rentrais à la maison avec mon copain Molina, par la basse Casbah. Arrivés devant l'entrée de l'école maternelle de la rue du Divan, donc à hauteur du café maure qui se trouvait juste en face, il me dit : 'il y a un homme qui nous suit'.
A cet endroit il y avait beaucoup de monde et nous étions en relative sécurité, mais nous allions rejoindre dans quelques mètres, la rue des Gétules en escaliers, sombre et déserte.
Pour ne pas éveiller les soupçons de cette personne, je ne me suis pas retourné pour vérifier ses dires, et je lui ai répondu :
'Dès qu'on aura passé le tournant on se mettra à courir'.
Il y avait effectivement un décrochement de quelques mètres entre la rue du Divan et la rue des Gétules.
Parvenus à cet endroit, nous nous sommes mis à courir et je crois que je n'ai jamais monté des escaliers (à peu près quatre étages) aussi vite. Et nous avons continué à courir tout au long de la rue Marengo, lui jusqu’au 23 et moi jusqu’au 31.
Arrivé chez nous, il n'y avait personne, j'allumais alors toutes les lumières des pièces qui donnaient sur la rue Marengo pour faire croire que je n'étais pas seul.
En fait, je n'ai jamais su si nous avions effectivement été suivis.
*

Un autre soir, il devait être relativement tard, puisque nous étions déjà à l’heure du couvre feu et donc qu’il n’y avait absolument personne dans la rue, à l’exception d’une patrouille militaire qui se trouvait au niveau de la boutique du cordonnier Zmirou. J’étais au balcon de la cuisine. Il y a eu un coup de feu venant de derrière le commissariat, donc invisible pour les militaires, ils se sont précipités jusqu’à le rue Darfour, là, ils ont tiré une rafale de mitraillette, mais, apparemment, sans atteindre personne.

Le lendemain nous avons vu un éclat sur le mur de l’entrée de notre immeuble, soit exactement deux étages sous l’endroit que j’occupais la veille au soir. Son existence et le fait que j’étais la seule personne possible dans le champ de vision du tireur m’ont fait penser que j’étais la victime espérée. Il avait peut être mal visé ou alors son arme, à une distance d’une soixantaine de mètres, n’avait pas dû être suffisamment puissante pour m’atteindre.
- Vers 1959, alors que je rentrais à la maison avec, là encore, un copain, par la rue Abderhamane en escaliers entre le jardin Marengo et le lycée Bugeaud, arrivés à l'avant dernier palier nous avons entendu deux coups de feu. N’ayant aucun endroit où nous réfugier, nous avons continué notre chemin. Arrivés rue Ben Cheneb, elle était déserte, tout le monde s’était mis à l’abri dans le café maure à l’angle de la rampe Valée. Ne sachant pas ce qui pouvait nous attendre dans un café maure, nous avons poursuivi notre route jusque devant la Médersa.
Un corps ensanglanté gisait sur le trottoir d’en face. Le tueur était encore là, soit près de cinq minutes après les coups de feu, il avait donc quelque chose à faire sur le corps sans vie. Il aurait pu, sans problème, tirer sur nous qui n’étions qu’à cinq mètres de lui. Il ne l’a pas fait, ça ne devait pas être sa mission. Mais notre présence l’a gêné et il s’est enfui dans les escaliers du boulevard de Verdun. C’était donc un règlement de comptes entre le FLN et le MNA.
Après coup, je me suis dit que nous l’avions échappé belle ! Je n’en ai pas parlé pour ne pas affoler Elise.
Le lendemain, nous avons appris que la personne abattue était monsieur Rihani, notre voisin du troisième étage, celui-là même qui me taquinait dans les escaliers de notre immeuble quand j’étais enfant.
*
Pendant la bataille d’Alger le général Massu a organisé une fouille complète, de toute la Casbah. Comme les militaires procédaient immeuble après immeuble, lorsque la fouille du 29 a été terminée et avant qu’ils n’arrivent au 31, nous avons vu, de la fenêtre de la cuisine de tante Pauline, des caisses d’armes passer d’une courette à l’autre par dessus le mur qui les séparait pour finir dans un logement du 29 rue Marengo déjà fouillé.
*
Le 11 décembre 1960 le FLN a organisé une manifestation monstre dans toute l’Agérie, donc dans Alger et surtout dans la Casbah. Presque toute la population de la vieille ville était présente (certains manifestants étant, probablement, recrutés de force malgré eux). La rue Marengo était envahie par une masse de manifestants innombrable, en furie. Les militaires chargés de maintenir l’ordre étaient débordés ; ils ont dû reculer et ont tiré en l'air à plusieurs reprises mais rien n'y faisait, la foule avançait toujours sur eux. J'étais sur le balcon de la chambre des garçons pour voir ce qui se passait, et mon voisin Laffer, du premier étage, était venu chez madame Mokrani pour le même motif (car les fenêtres de son logement, ne donnaient que sur la rue de Toulon). Pendant tout le temps où j'étais au balcon, lui qui était sur celui juste à côté, n'a cessé de me narguer et, bien sûr, je ne pouvais rien dire. Mustapha Benzeroug qui était à ses côtés était très gêné par ses commentaires.
Le soir quand la manifestation s'est un peu calmée, nous avons dû quitter notre logement, pour toujours, sous la protection de l’armée.
C'est la dernière fois que j'ai vu la rue Marengo.
Mais dans la nuit la manifestation a repris de plus belle. Le champ était libre, les militaires s’étant retirés, les logements que nous avions abandonnés ont été occupés définitivement avec tous leurs contenus, meubles, vêtements, vaisselle,….et nos souvenirs.
Comme nous n’avions pas de logement où aller, ce départ inopiné a conduit à l’éclatement de notre famille qui s’est dispersée dans les différents logements de mes oncles et tantes.
Nous avons ainsi vécu pendant plusieurs mois avant de retrouver un logement rue d’Isly.
Ce départ de la rue Marengo était un premier départ précipité. Un second, pour quitter définitivement et notre second logement et l’Algérie, allait suivre quelque dix neuf mois plus tard.
Le fournisseur des produits professionnels de Armand était le droguiste Hosanna. Il avait sa boutique dans une rue en escaliers (quoi de plus normal puisqu’on était dans la Casbah) au dessous des marchands de poissons du marché Randon.
Un jour Elise m'a envoyé chez lui pour acheter une brosse à chiendent. Arrivé à la boutique je lui ai demandé une brosse à dents de chien, il a attrapé un fou rire.
Au début juillet de chaque année avait lieu notre déménagement pour les Horizons Bleus. Monsieur Hosanna arrivait avec sa camionnette à ciel ouvert dans laquelle nous entassions tout ce qui nous était nécessaire : matelas, ustensiles de cuisine, linge, vêtements... nous étions fiers de participer à ce déménagement et, surtout, excités à l'idée de nous retrouver le soir même aux Horizons Bleus pour deux mois et demi environ !
Un ajout de dernière minute :
Dans le rue Marengo on se mariait entre voisins, c'est ainsi qu'en ne considérant que les membres de ma famille et les voisins proches :
Armand Timsit du 32 a épousé Élise Durand du 31
Léon Georges Durand du 31 a épousé Rose Zaffran du 29
Claude Biton du 34 a épousé Andrée Bellaloum du 31
Robert Bakry du 34 a épousé Mireille Timsit du 32
Roger Lalou du 31 a épousé Andrée Biton du 34
William Durand du 31 a épousé Germaine Siksik du 36
? Arfi Rampe valée a épousé Jeanine Zaffran du 29
Plus bas dans la rue Marengo le membre de notre groupe Patrick Mourjan, nous a informés que sont père du 27 a épousé sa mère du 21.
Il y en a certainement beaucoup d'autres !
Voilà, pour la rue Marengo c'est terminé.

J'ai encore beaucoup de souvenirs à vous présenter, je le ferai dans l'ordre où je les ai écrits, certains ne vous intéresseront pas, ce sera probablement le cas du prochain chapitre consacré aux Horizons Bleus.
Les suivants se rapprocheront peut-être davantage de ce que vous avez vécu.

 

De : Antoine/Tony BILLOTTAEnvoyer un mail

Le : 20/07/2024 08:07

Encore des souvenirs vécus et partagés....

Serge Timsit·

La rue Marengo (14) et peut-être avant dernier épisode
Dans la rue Marengo tout le monde vivait en harmonie, et même si, au niveau des mariages, la mixité était extrêmement rare (j’en ai connues), chacun respectait l'autre et les relations de voisinage étaient excellentes. D'ailleurs toutes les fêtes étaient célébrées par tous.
A Noël chaque enfant avait, au moins, un jouet, quelle que fût sa religion (c'était déjà devenu une fête païenne), et pour les Rameaux, on voyait les petits arabes (c'est comme ça qu'on appelait les enfants musulmans) endimanchés se promener avec des rameaux ornés de papier argenté et garnis de sucreries. Aujourd'hui, même les chrétiens ne le font pas. Et pour le Ramadan, nous mêmes, l’après midi, dès quatre heures et demie, nous nous mettions au balcon, attendant avec impatience le coup de canon qui mettait fin à la journée de jeûne. Et cinq minutes après ce fameux coup de canon, la rue, alors pleine de monde, se transformait en désert. Elle reprenait vie dans la soirée pour une longue nuit.
Et bien sûr, nous profitions de toutes les douceurs fabriquées par nos voisins à cette occasion.
*
Régulièrement, le marchand d’habits passait dans la rue. Avec son sac sur le dos, il criait toutes les dizaines de mètres ‘Marchand d’habiiiiiits’ et quand on avait des vêtements qui ne pouvaient plus nous servir, nous lui faisions signe. Il montait chez nous, nous lui présentions les vêtements, il les examinait sous toutes les coutures (c’est le cas de le dire), réfléchissait, gardait le silence, examinait à nouveau les vêtements offerts, ne bougeait pas et après un long moment de réflexion annonçait un prix dérisoire.
Nous contre proposions un prix plus haut et la discussion de marchand de tapis commençait, euh, pardon ! c’est la discussion de marchand d’habits. Progressivement les prix se rapprochaient et un accord était toujours finalement trouvé à la satisfaction de chacun. Il sortait alors de son saroual sa liasse de billets de banque, payait exactement le prix convenu, introduisait sa nouvelle acquisition dans son sac et repartait à la recherche d’un autre fournisseur de vêtements.
Un moment plus tard, on l’entendait, avec une voix plus éloignée, encore appeler ‘Marchand d’habiiiiiits’.
*
L’électricité était distribuée par des câbles installés sur des supports fixés aux parois des immeubles. Au printemps de chaque année les hirondelles faisaient une escale rue Marengo lors de leur pérégrination vers les pays européens. En fin d’après midi, elles s’installaient sur ces câbles. Il y en avait des milliers côte à côte tout le long de la rue et elles ne laissaient pas un millimètre de libre entre deux voisines.
Et puis, un beau matin elles avaient disparu.
Je ne me souviens pas les avoir revues à l’automne pour leur retour vers l’Afrique. Mais peut-être étions nous encore aux Horizons Bleus
*
Là, c’était Rampe Valée et non rue Marengo. Des chiens erraient dans la ville, probablement non vaccinés et risquaient de transmettre la rage, qui, à l’époque, n’était pas éradiquée en Algérie. Galoufa était chargé de les récupérer. On le voyait souvent circuler dans sa camionnette, à la recherche de chiens sans maître. Lorsqu’il en détectait un, avec un filet au bout d’une longue perche il s’en approchait doucement, essayait de l‘attraper et s’il y parvenait, il l‘installait dans la partie isolée de l’arrière de son véhicule, éventuellement, avec d’autres chiens mais chacun dans une cage individuelle. Ils étaient ensuite emmenés à la fourrière et si, au bout de trois jours, personne ne les réclamait, ils étaient piqués et donc euthanasiés.
*
Les 'petits arabes' jouaient beaucoup dans la rue ; ils avaient différents jeux :
- le cerceau ; ils utilisaient toutes sortes de cercles en métal, certains étaient des roues de vélos usagées, d’autres je ne sais pas trop où ils les trouvaient, ils les guidaient avec un fil de fer qu'ils avaient façonné à ses extrémités, l‘une en forme de U qui encadrait le bord du cerceau pour lui servir de guide, l’autre renforcée pour servir de poignée à l’enfant. Nous les voyions courir dans la rue avec. Ils étaient très habiles et parvenaient à faire des slaloms pour éviter les passants qui circulaient devant eux.
- la marelle, souvent dans sa forme spirale,
- et surtout, la carriole qu'ils confectionnaient avec des planches et des roulements à billes. Une planche, suffisamment large, servait de siège. Sous cette planche, à l'arrière, était fixé un essieu de bois aux extrémités duquel étaient insérés deux roulementsbilles. Devant, l’assise était prolongée, en son milieu, par une planche plus étroite sur laquelle était montée, en travers, une planchette mobile avec un roulement à billes en son milieu. C'est elle qui guidait la carriole soit grâce a une ficelle fixée à ses extrémités, soit directement avec les pieds dessus. L’angle donné au roulement à billes avant permettait de définir la direction prise par l’engin.
Lorsque la pente de la rue le permettait, les enfants circulaient seuls ; sinon ils se faisaient pousser par un de leurs camarades.
- Pour la fête de Mouloud, ils jouaient également avec des pétards. Il y en avait de deux sortes :
Les classiques destinés à faire du bruit. Ils étaient composés d'un petit cylindre gris en carton qui contenait, je suppose, de la poudre. Le cylindre était prolongé par une petite mèche qu'on allumait, qui se consumait puis le faisait exploser à grand bruit. Je dirais que c'était un bâton de dynamite en miniature.
Les bombes qui avaient la forme d'un bouchon de bouteille de vin en un peu plus court. Elles étaient également en carton gris et contenait plus de poudre qu'un pétard classique. Aux extrémités du cylindre, il y avait un produit inflammable en cas de choc (du soufre ?). Ces bombes étaient jetées violemment sur le sol et explosaient à son contact. Elles étaient dangereuses car elles provoquaient des brûlures sérieuses si on se trouvait à proximité. C'est ainsi, qu'à plusieurs reprises, je me suis retrouvé avec des plaies aux jambes.
*
Parfois Messali Hadj apparaissait, rue Marengo, dans sa belle américaine, une cadillac (si je me souviens bien) décapotable et décapotée. Lui et sa voiture provoquaient la curiosité et l'admiration de tous ses fans. Les enfants s'agglutinaient autour de sa voiture et l’empêchait d’avancer.
Massali Hadj était le créateur et le chef du MNA (Mouvement Nationaliste Algérien), une organisation, bien plus modérée que le FLN, et, je suppose, adepte de la négociation. C’est, bien sûr, le FLN, plus virulent, qui à gagné la guerre fratricide que se sont menée ces deux mouvements et Messali Hadj a été exclu de toute action politique, alors que c’est lui qui avait été l’initiateur de la rébellion, en réclamant, dès 1927, l’indépendance de l’Algérie.
*
De temps en temps, des danseurs noirs avec leurs tambourins, leurs trompettes, leurs darboukas et leurs espèces de castagnettes en métal noir (des kekrebs) parcouraient la rue, dansaient au son de leurs instruments, et de nos fenêtres, nous leur lancions quelques pièces de monnaie qu’ils s’empressaient de ramasser.
*
Le dimanche, avec nos voisines du troisième étage nous allions au cinéma dans la quartier de Bab el Oued équipé de nombreuses salles : Le Plaza, le Suffren, la Perle, le Trianon, le Marignan, les Variétés, le Majestic , le Mon Ciné... Elles se trouvaient toutes à moins de cinq cents mètres de notre point de rencontre, la Grande Brasserie.
Presque toutes avaient un parterre et un balcon où le prix des places était plus élevé.
Le Majestic était le plus grand cinéma de toute la ville. Il avait une scène qui pouvait accueillir différentes manifestations, telles que des tours de chants, des spectacles sur scène, dont la troupe des danseurs de l’armée russe que j’ai eu la chance de voir un dimanche matin, des rencontres sportives (combats de boxe ou rencontres d’escrime) ou même les meetings politiques, mais c’était beaucoup plus rare.
La salle du cinéma avait un toit ouvrant, coulissant sur des rails, il permettait de bien l’aérer après les spectacles, s’il ne pleuvait pas.
Partout le programme changeait chaque semaine, le jeudi.
Aussi, ce jour là, dès le matin la cérémonie du cinéma commençait. Elise se réunissait avec nos deux voisines, mesdames Leguem et Bellaloum, pour choisir le film que nous irions voir le dimanche. La réunion pouvait durer jusqu’à trouver un compromis qui satisfît chacune.
A l’époque les places à occuper était fixées à l’avance, aussi, dès l’après midi nous étions chargés d’aller les réserver. Nous allions au guichet du cinéma retenu et, après avoir fait la queue, devant la guichetière qui détenait les plans de la salle pour toutes les séances de la semaine à venir, nous demandions celui du jour et de la séance choisis. Sur la page correspondante, elle avait déjà mis une croix, avec un crayon de couleur, très gras, bleu ou rouge, sur toutes les places déjà retenues. Nous sélectionnions, en lui montrant avec notre index à travers sa vitre les places que nous voulions retenir.
Selon les consignes que nous avions, il ne fallait pas qu’elles soient dans les premiers rangs parce que trop près de l’écran ça faisait mal aux yeux, pas vers le fond de la salle parce que c’était trop loin, pas sur les côtés parce qu’on y voyait mal. Nous arrivions toujours à trouver le bon compromis, parce que nous nous étions pris suffisamment tôt dans la semaine, pour acheter nos huit places (trois pour les Bellaloum, deux pour les Leguem et trois pour nous (Elise, Hélène et moi) ; mes frères plus âgés sortaient ensemble avec leurs copains.
Nous choisissions systématiquement la seconde séance de l’après midi qui commençait à 16 heures 30, ça nous laissait le temps de nous préparer après le déjeuner et ça nous permettait de rentrer chez nous, à l’heure pour le dîner. Pour aller au cinéma, nous étions endimanchés, c’était une cérémonie, il fallait que nous fussions belles et beaux, mais pas Belzébuth.
Quand nous nous présentions au cinéma le dimanche, une première personne filtrait les entrées en vérifiant les tickets (le bon cinéma, le bon jour, la bonne séance, le bon nombre de tickets), et les déchirait. Puis, une fois dans la salle, il fallait rester devant l’entrée en attendant qu’une ouvreuse vienne nous prendre en charge ; et après qu’elle ait lu le rang et les numéros réservés, elle nous conduisait à nos places moyennant un pourboire.
La séance se déroulait en deux temps. Tout d’abord les actualités de la semaine étaient présentées, c’était normal puisque la télévision n’existait pas. Ces images d’informations étaient formidables pour nous. Mais résumer tout ce qui s’est passé dans le pays et dans le monde la semaine précédente en quelques minutes relevait d’une gymnastique extraordinaire et beaucoup d’évènements susceptibles de nous intéresser n’étaient pas traités.
Les actualités étaient suivies d’un documentaire ou d’un court métrage souvent amusant ; puis il y avait le ‘lancement’ ; il s’agissait de présenter quelques images du film programmé pour la semaine suivante.
Parfois le film se déroulait en deux épisodes et, bien entendu, le premier se terminait toujours à un moment dramatique plein de suspense. La présentation de la seconde phase qui était au programme de la semaine suivante était très alléchante. Les séries d’aujourd’hui se sont inspirées de cette technique.
Pour terminer la première partie du spectacle, la publicité était présentée par la société Afric Films qui annonçait son adresse et son numéro de téléphone.
*
A propos du téléphone dans les années cinquante, lorsqu’on avait un téléphone, ce qui était rare, on payait un abonnement mensuel aux PTT ; il fallait y ajouter le prix des communications qui étaient facturées à la minute. Il y avait un forfait pour les trois premières minutes puis chaque minute supplémentaire coûtait assez cher (70 centimes de franc de l’époque pour chaque minute commencée, si ma mémoire est bonne).
Et lorsqu’on voulait téléphoner sur longue distance, il fallait passer par l’inter. On était mis en relation avec une opératrice qu’on informait du lieu et du numéro demandé. Au moyen de fiches sur un immense tableau, elle nous mettait en relation avec le central du numéro appelé (le 22 à Asnières, ça ne vous rappelle rien ?)
Les communications longue distance étaient, bien sûr, d’un coût bien supérieur à celui d’une communication locale.
A cette époque on était bien loin des smartphones et des appels illimités inclus dans l’abonnement ! Que d’évolutions en 70 ans !
Je me souviens que des amis de mes parents avaient un téléphone (nous, non). L’épouse étant très bavarde, elle avait pris l’habitude d’y passer beaucoup de temps (c’était déjà une drogue ?) ; sur le moment la dépense était invisible et donc insensible, elle n’apparaissait qu’avec la facture mensuelle des PTT et générait de nombreuses scènes de ménage dans le couple. Las, le mari a finalement trouvé la solution : il a bloqué le cadran du téléphone avec un cadenas sur le 1 et son épouse ne pouvait plus le faire tourner pour appeler ses correspondants
Après mon aparté sur le téléphone, je reviens au thème du cinéma. Après la publicité, la salle s’éclairait, c’était l’entracte pendant lequel les ouvreuses circulaient avec un plateau, maintenu à l’horizontal par une bretelle qui passait autour de leur cou, rempli de cacahuètes, de bliblis, de bonbons, d’autres sucreries de toutes sortes et d’esquimaux qu’elles essayaient de vendre ; et nous les entendions énoncer sans cesse : Bonbons, Caramels, Esquimaux chocolats
Après un quart d’heure le noir revenait et le film commençait enfin. On l’appelait le grand film !
Le dimanche, pendant que nous allions au cinéma, les maris de ces dames se reposaient de leur longue semaine de travail.
À l’époque elle était, pour les salariés, de quarante quatre heures soit huit heures pas jour du lundi au vendredi et quatre heures le samedi matin, mais les heures ne comptaient pas et très souvent les employés faisaient des heures supplémentaires non payées ; En fait, l’unité de mesure n’était pas l’heure mais la journée.
Pour les commerçants et les artisans, c’était au minimum huit heures par jour du lundi au samedi.
Armand, lui, ne se reposait pas le dimanche, il en profitait pour aller passer la journée à la pêche avec la barque à rames, le Jacqueline, qu’il possédait au Club Nautique d’Alger. Et le soir il nous rapportait ses prises fraîches pour notre dîner, c’était au minimum de la friture ou du poisson de roche pour la soupe de poisson. Parfois, il s’agissait de pièces plus importantes (sars, pageots, dorades . …) et alors c’était de la grillade.
Un dimanche il est revenu de la pêche avec une langouste. Pour la faire cuire, nous l’avons plongée dans une marmite d’eau bouillante. Madame n’a pas apprécié, elle s’est révoltée et a donné un grand coup de queue, elle a tout éclaboussé, elle s’est envolée et a atterri par terre. Nous avons recommencé l’opération et elle s’est enfin résignée, elle a admis sa défaite et nous avons pu la faire cuire. Ce soir là nous avons fait un repas de gala.
Parfois, le jeudi, j’allais à Mon Ciné avec mes cousins. C’était un petit cinéma de quartier, bas de gamme, sans balcon, dans lequel on présentait des films de seconde série ou anciens. Les places n’étaient pas chères. On y voyait des films tels que des westerns, des films loufoques avec Bud Abbott et Lou Costello, Laurel et Hardy, ou encore des films d’aventure comme Tarzan avec Johnny Weissmuller.
Certaines des scènes de ce dernier long métrage, notamment celle de l’arbre où Tarzan pousse son fameux cri, ont été tournées au jardin d’essai.

 

De : Maryse MayorEnvoyer un mail

Le : 16/07/2024 13:08

Joyeux anniversaire à Alain Abou du 74 bis de la consolation
il fête aujourd’hui 16 juillet ses 80 ans .
Peut être quelqu’un a de ses nouvelles réponse en MP

 

De : ponsEnvoyer un mail

Le : 15/07/2024 10:31

Nous sommes des amis de Paquito ainsi que son épouse qui est a présent décédée
Paquito habite a Montauban
ils sont venus plusieurs fois a la maison
nous étions en contact par email ; plus rien


La dernière que j ai un message sur se site "on" m a dit qu il était décédé

c est impossible qui peut me donner de plus amples explications???

merci

 

De : Antoine/Tony BILLOTTAEnvoyer un mail

Le : 12/07/2024 08:53

De mon copain, Serge Timsit, gardien de but de hand-ball au Red Staret qui nous offre ses souvenirs....

La rue Marengo (12)
Au pied de notre immeuble, juste à côté de l’entrée, à gauche, un artisan faisait des beignets, des makrouts aux dattes et des zlabias mielleux. J’aimais ces derniers lorsqu’ils étaient encore chauds et croustillants ; une fois refroidis le miel les avait ramollis et, devenus pâteux, ils ne me plaisaient plus.
Pour les fêtes musulmanes, l’étal regorgeait de gâteaux aux amandes et/ou au miel de toutes sortes présentés sur des plateaux. Il y en avait tellement de chaque sorte qu’ils formaient des pyramides de plus de trente centimètres de haut.
Parfois pour notre goûter de 11 heures, à la sortie de l’école, (nous avions le goûter de 11 heures et le goûter de 4 heures), nous descendions acheter des beignets. Le marchand avait préparé la pâte qu’il stockait dans un récipient ; il en prenait une poignée, la façonnait et, avec un mouvement circulaire de ses mains, l’envoyait tournoyer dans l’huile bouillante de son four. Quelques secondes plus tard, il enveloppait notre demi-douzaine de beignets dans du papier journal.
Quel manque d’hygiène pour les jeunes d’aujourd’hui ! Mais ce ‘manque d’hygiène’ nous a, peut-être, fortifiés et renforcé nos défenses immunitaires.
Toujours est-il que nous nous empressions de remonter notre achat ; nous saupoudrions de sucre ou recouvrions de miel les beignets tout chauds, encore sur leur papier journal, et nous nous régalions.
A gauche du marchand de beignets, la boulangerie de monsieur Rihani, après la période de rationnement, proposait différentes sortes de pains dont du pain blanc plus cher et des biscottes au détail fabriquées maison.
La farine lui était livrée par une grande charrette tirée par deux chevaux. Les sacs de farine, d’une cinquantaine de kilos, étaient descendus à dos d’homme un étage plus bas, rue de Toulon dans le fournil de la boulangerie. Au préalable les chevaux voyaient leur bouche armée d’un sac de son attaché à leur cou. Pour bénéficier de cette nourriture, ils étaient obligés de lancer rapidement leur tête en arrière pour obtenir chacune des gorgées.
A droite de l’entrée de l’immeuble, travaillait notre coiffeur Thomas à côté duquel s’était installé le nouveau laitier qui était en même temps glacier.
Il vendait, comme Aïder, le lait au détail, le petit lait et le beurre qu’il fabriquait dans une baratte installée juste à l’entrée de la boutique. Quand elle tournait, il intervenait de temps en temps pour récupérer les grains de beurre avec une spatule en bois.
Les glaces industrielles n’existaient pas, il les fabriquait lui même et elles étaient bien meilleures que celles que nous consommons aujourd’hui. Bien sûr, le nombre de parfums était limité, mais ils étaient naturels.
Souvent, on descendait avec une casserole et on lui demandait de nous préparer du créponné (sorbet) ; il versait dans sa sorbetière industrielle du jus de citron (du vrai), de l’eau et du sucre selon des dosages bien déterminés puis il la mettait en marche ; une pale hélicoïdale tournait presque jusqu’aux parois du cylindre glacé qui contenait tous les ingrédients, elle les mélangeait et le sorbet qui se formait progressivement était récupéré avec une spatule et reversé dans notre casserole.
Quelques dizaines de secondes plus tard nous repartions avec notre récipient plein de sorbet pour quelques sous.
Je me souviens que lorsque j’en avalais trop en une seule seule cuillerée, le froid me donnait très mal à la tête et j’étais obligé de m’allonger un moment en attendant que ça passe.
Au 32 vivait Marie Timsit. Elle était la seule de mes quatre grands parents que j’ai connue, les trois autres sont décédés avant ma naissance.
Elle était âgée et avait du mal à se déplacer, nous l’aidions dans tous les sens du terme, et lui rendions visite ainsi que ses petits enfants et ses autres enfants, dont bien sûr ma tante Mireille qui habitait au 34.
Elle habitait au premier étage, sa cuisine était aveugle, la seule petite lueur du jour qui y parvenait provenait d’un puits de lumière qui allait de la courette qui la jouxtait jusqu’à une verrière au sommet de l’immeuble.
Un jour, un cambrioleur est passé par la terrasse ; il a fait une fausse man½uvre et a cassé la verrière qui s’est écroulée chez Marie sans faire de gros dégats.
Au 33, de l'autre côté de la rue de Toulon par rapport à notre immeuble, se dressait l’école de garçons (la mixité des écoles primaires n’existait pas à l’époque, il fallait attendre d’être dans les établissements d’enseignement supérieur pour qu’elle soit autorisée). Le directeur était monsieur Muriot dont le fils André était mon grand copain. Nous étions dans la même classe et sur le même banc au collège Guillemin. C'est lui qui, dans un premier temps, m'a fait jouer au handball en tant que scolaire, et ensuite au Red Star d'Alger, avec son frère aîné Jacques, assassiné et vidé de son sang. C’était une période où le FLN tuait beaucoup de jeunes hommes pour, notamment, récupérer le sang dont il avait besoin pour soigner ses blessés.
Nous faisions nos devoirs ensemble, souvent dans le bureau du directeur de l'école, et parfois, lorsque nous n'avions pas trop envie de travailler, nous allions dans la cour et avec André et Jacques, nous jouions au ballon. Moi, bien sûr, je jouais le rôle de gardien de buts entre deux piliers du préau !
Lorsque nous avions des devoirs de math à faire, je m'attaquais directement aux exercices, André voulait commencer par apprendre la leçon, mais je n'en éprouvais aucunement le besoin, J’avais déjà compris et retenu la leçon en cours.

 

De : Antoine/Tony BILLOTTAEnvoyer un mail

Le : 11/07/2024 10:50

Souvenirs, souvenirs....

SQUARE GUILLEMIN DE HUBERT ZAKINE.


Entre les deux jardins du boulevard Guillemin, un homme il a installé sa baraque où y fabrique des barbes à papa mais il est surtout connu comme vendeur d’oublis. Ces friandises, genre de grandes gaufrettes très fines en forme de cornets, on les adore. Comme c’est pas cher, il en débite un nombre incalculable. Gentil avec les enfants, cet homme à la dentition d’or et d’argent y se reconnaît à son pied bot et à son béret toujours vissé sur la tête qu’on a jamais vu dénudée.
Les oublis, il faut les manier délicatement sinon y se cassent. Aussi, tous les soirs avant de partir, il offre les gaufrettes abîmées à la nuée de chitanes qui lui tourne autour.
Quand les enfants y jouent pas au foot, y se mesurent aux billes, le long du trottoir rectiligne entre les deux jardins. Et les voitures, elles ont beau klaxonner, même Azrine ne peut pas passer. Combien de parties elles se sont gagnées ou perdues pour un pam. Ah, oui, vous savez pas ce que c’est un pam ! Ca pourrait être la boisson qu’on aimait quand on était petit, le pam pam mais total, c’est la distance entre l’ongle du pouce et l’ongle du petit doigt quand la main elle est bien ouverte. C’est une variante du jeu de billes. Quand on est pauvres, on a des jeux de pauvres. La savate, une méva de semelle crêpe suffit, la carriole, on se la fabrique avec des planches et des roulements à billes, les noyaux d’abricot ça coûte que dalle, les bouchons vides ou lestés de bougie fondue, on les trouve derrière les comptoirs de cafés, les tchapp’s, (faces imagées des boîtes d’allumettes) ça coûte trois fois rien, alors les jeux de riches, très peu pour nous ! Tain, le philosophe ! Quant au foot, quand on est fauché, on se la fabrique avec des tombées de tissu ou du papier journal et des élastiques. Mais le fin du fin, c’est les matches d’égout à égout avec des balles de tennis usées jusqu’à la corde et sales, j’vous dis pas ! Quand on marque un but, le buteur, sa récompense c’est de soulever la plaque qui pèse une tonne (l’exagération ça fait partie du langage pataouète) et tremper sa main dans l’eau dégueulasse de l’égout pour récupérer la balle.
Nicole, je la vois tous les jours. Chaque après midi, elle met une nouvelle robe comme si elle a la bourse de Rothschild. Une fois en rouge, une fois en jaune, une autre fois en bleu, blanc, rouge. Jamais, elle s’habille en vert. On dirait qu’elle a deviné que cette couleur et moi, on fait pas un beau couple. Chaque jour, avant de descendre au jardin, j’enfile un tricot propre parce que je veux pas lui faire honte. D’accord, je me mets pas sur mon 31, mais la vérité, bien coiffé et bien lavé derrière les oreilles, propre comme un sou neuf, je suis quand même le plus beau du monde et des alentours. Au moins, Nicole, c’est bien la preuve qu’elle m’aime pas pour mes habits du dimanche. Seulement, derrière elle, elle traîne toute une flopée de demoiselles d’honneur. Des Denise, des Jacqueline, des Maryvonne, des Colette, Achno, jamais on peut être seuls ! Mais comme je suis astucieux et dégourdi (n’en jetez plus, la cour est pleine), je traîne aussi derrière moi des copains qui draguent à mort. Châ, je peux emmener Nicole en bas, face à la mer. Seuls ! Dommage que je peux pas l’embrasser devant tout le monde mais au moins, elle peut me dire que suis le plus musclé. Rien qu’on rigole et rien qu’elle surveille son petit frère qu’on dirait un explorateur avec son filet à papillon. Des papillons de toutes les couleurs, il y en a plein autour des parterres de fleurs des enceintes du jardin Guillemin. Je fais comme si c’était une amie, une copine, une cousine mais au fond, même si on a douze ans, je sais que c’est pas une copine comme les autres. Encore moins un copain. D’abord, ça se voit parce que mes copains n’ont pas des tétés. Ensuite, jamais il me viendrait l’idée d’embrasser Bouzouz ou Gozlan sur la bouche et encore moins avec la langue. Beurk ! Et enfin, parce qu’avec Nicole, je fais celui qui dit pas de gros mots. Les amis, même muets disent des gros mots. (Ça, c’est une de mes pensées profondes) D’accord, dés qu’un adulte il approche, on parle chochotte mais quand on est entre nous, les « Tain dé ! », « va niquer les mouches ! », « la figua de ta ouélla » (j’en ai comme ça une bonne centaine et même un peu plus), y fleurissent notre langage, j’vous dis pas. Même que des fois, si on écoutait nos conversations au magnétophone, on aurait honte. Avec Nicole, zarmah, je suis un enfant bien élevé. Seulement, bien élevé jusqu’au premier étage, hein parce que plus haut, le naturel y revient au triple galop. Purée, d’où elle me vient cette pudeur soudaine ? Jamais, au jardin ou ailleurs, quand on est avec des enfants de mon âge ou plus grands, jamais je m’suis contrôlé de la sorte. Bou, de la sorte ! Je parle comme une tapette maintenant ! Avant de connaître Nicole, je parlais pataouète sans faire de chiqué. Aouah, il faut que je redevienne un voyou fissa comme quand j’allais au tribunal pour enfants parce que je jouais trop au football, que je dise la tonne de grossièretés, que je parle en mollardant, que je tape des bras d’honneur toutes les cinq minutes, que je joue au cinq/vingt cinq devant les cafés, enfin que je sois un vrai voyou plutôt qu’un fils à pèpe.

 

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